vendredi 28 décembre 2018

2018 adorables

Les pigeons et corbeaux n'ont pas pu écouter un nombre considérable d'albums cette année. Notre bulletin n'est jamais qu'un instantané complètement subjectif et humble des quelques centaines de disques écoutés cette année, rapporté à la quantité monumentale de disques parus, des dizaines de milliers de joyaux et de merdes.
En agglomérant cette liste, je me suis rendu compte que la scène locale se porte bien. Cinq groupes français, Rhume Carabiné, Delacave, Villes Nouvelles, Rendez-vous et Yves Bernard, y figurent en bonne place. Soutenez-les, adorez-les, bref, allez les voir.
Tu trouveras dans la liste des albums qui n'ont (malheureusement) pas de support physique. Même pas une cassette à cinquante copies. C'est une tendance lourde de la production musicale. Bientôt, seuls les dinosaures stockeront encore des disques chez eux. Ou bien on trouvera à nouveau des vinyles dans les supermarchés...
Innovation cette année, j'ai essayé d'arranger les albums en fonction d'un classement. L'opération Top 25 commence ainsi...


1 - Villes Nouvelles ‎– At The End Of Truth (Detriti)


Le disque favori de 2018 vient d'Aix-en-Provence via un label de Berlin. On en a parlé récemment sur ce même blog. Frissons à chaque écoute.


2 - Decades/Failures ‎– Untitled No​.​4 (DIY)



Le EP sorti par Decades/Failures en 2018 fait suite à une excellent LP qu'on avait déjà beaucoup apprécié. Il ne bénéficie toujours pas d'un support physique, on doit se contenter de téléchargements plus ou moins officiels. Ça n'empêche pas la musique de tuer, comme on l'avait dit ici même quelques mois auparavant.



3 - Rhume Carabiné ‎– Marcale (Poutrage, Distag, Vague Á L'âme, Araki)



Tout nouveau, tout chaud, le très attendu album de Rhume Carabiné, premier à paraître en vinyle, dépasse tout ce que Loïck a pu faire jusqu'à présent. Il est passé aux choses sérieuses. Nous partageons beaucoup de goûts musicaux lui et moi, mais encore faut-il transformer ses idées en actes. L'album pioche dans des influences variées, de Taxi Girl à Noir Boy George, avec suffisamment de variété entre les morceaux et de crudité dans les textes pour avoir envie d'y revenir encore et encore.



4 - Preoccupations ‎– New Material (Jagjaguwar)




Un des rares "gros" disques de la liste, édité par un gros indépendant. L'album a été passé au crible il y a quelques semaines. C'est une petite merveille de précision qui dépasse les genres et devient lui-même une référence, une pointure P&C comme Merchandise, Soft Kill, Drab Majesty, etc. dont tous les disques sont scrutés, creusés.



5 - TRAITRS ‎– Butcher's Coin (Manic Depression)



TRAITRS pourrait gagner aisément le titre de meilleur groupe vintage en 2018. On ferme les yeux, on ne laisse bercer et on ne sait plus si le disque est paru maintenant ou en 1983. Il avait fait l'objet d'une causerie en septembre. A réviser au plus vite si tu écoutes encore Faith de temps en temps.




6 - Words And Actions ‎– Senza Veleno (Detriti)



Ce premier vinyle après une foultitude d'excellentes cassettes, avec un style délaissant peu à peu les sons techno pour ne garder que des éléments bruts de fonderie, était guetté comme le lait sur le feu. J'avais adoré le précédent, Pensieri Di Nessuno, hymne à la ritale darkwave. Senza Veleno se situe dans la même veine, entre chaos subtil et suprême claquade d'un rythme jerk qui te chope les baskets. Envoûtant et inattendu.



7 - Yves Bernard ‎– Demo (Future Folklore, Cool Marriage) 



Incursion synth-punk dans cette liste, la cassette d'Yves Bernard aurait pu tout aussi bien sortir en LP que personne n'aurait trouvé ça étrange. Surtout pas les fans de Metal Urbain et de Plastic Bertrand. Elodie en a très bien parlé ici. Album complètement addictif, on attend la suite !



8 - This Is The Bridge ‎– Broken Sculptures (Tonn)


Sorti au tout début de l'année, c'est sans doute le premier disque de 2018 que j'étais sûr de retrouver dans cette liste. Ça envoie la darkwave brillamment ça madame. Comme les Anglais savent faire depuis Gary Numan. Redoutablement efficace. 



9 - Dancing Plague ‎– Pure Desperation (Black Verb)


Suite de l'énorme démo Habitual, le premier album de Conor Knowles est paru dans une version supra limitée que seuls quelques affranchis ont pu atteindre. Bien dommage car cet album a le potentiel pour faire danser dans les soirées de l'ambassadeur. Voire même dans ton salon. Qui sera le bienfaiteur de l'humanité qui mettra ces morceaux en galette ?



10 - Delacave ‎– Window Has No Glass (24h/jamais, POUeT! Schallplatten, Teenage Menopause)


Habitués des listes P&C, les Delacave ont encore sévi en 2018 et se trouvent justement récompensés de leurs efforts. Enfin, on n'a pas l'impression qu'ils forcent. Leur zik coule, elle va de soi. L'album flirte avec les genres comme une musique de traverse. Il faut s’asseoir et écouter. Se laisser submerger. Oublier le neofolk, le kraut, les olives, le noyau, le pêcher. Entendre la complainte et y adhérer.




11 - Constant Mongrel ‎– Living In Excellence (Anti Fade, La Vida Es Un Mus)



Une autre vieille connaissance des P&C, dont on avait parlé dans notre page australienne en 2017. Retour en grâce avec un magnifique album sur le label du magnifique Paco Mus, il aurait dû faire l'objet d'une bafouille si le temps était moins contraint et mon courage plus grand. Si comme moi tu trouves que les disques de Total Control ne sont pas assez nombreux, Constant Mongrel t'offre une option intéressante, moins électronique peut-être ? finalement une valeur sûre de cette année, qui s'écoutera encore et encore.




12 - Death In June ‎– ESSENCE! (New English)


Le maistre Douglas n'avait pas produit d'album studio depuis une petite dizaine d'années, le temps sans doute de trouver l'inspiration pour renvoyer une fournée. Le disque devrait ravir les fans. Il y aura bien des grincheux pour se plaindre, il y en a toujours, mais dans l'ensemble j'ai été emballé par cette galette à peine parue. Elle me rappelle assez The Rule Of Thirds dans son équilibre. Plutôt calme, voix en avant, l'album cache ses armes et ses lames. A la deuxième écoute, tu sais déjà que ça ne sera pas la dernière. 



13 - Psychic Guilt ‎– EP1 (DIY)



Autre projet de Conor Knowles, j'ai adoré son premier EP, lequel avait d'ailleurs fait une apparition sur ce blog. J'ai croisé les doigts toute l'année en espérant une sortie en 12" qui aurait fière allure. Je suis bon pour attendre encore un peu on dirait. Psychic Guilt a sorti (enfin...) un autre EP à l'automne, qui attend aussi une édition physique pour qu'on puisse écouter autre chose que du son compressé.



14 - Soft Kill ‎– Savior (Profound Lore)


Pas très original de retrouver un disque de Soft Kill dans une liste P&C, même si celui-ci n'est pas dans mes "tous favoris" de l'année. Les moments glorieux sont à mon goût un peu moins nombreux que sur les disques précédents. L'album fond tranquillement à l'écoute, il aura sa place dans la discothèque, mais je suis persuadé que je jouerai d'autres disques de Soft Kill avant celui-ci. Ça reste tout confort.


15 - The Column ‎– Oracle (Funeral Party)


Très bel OVNI proposé par Funeral Party, inégal certes, il contient des morceaux dantesques dont on avait parlé cet été. A sa juste place dans cette liste, j'espère entendre un autre album de The Column l'an prochain. Grand espoir du post-punk.



16 - Valuemart ‎– Homegrown Vandal (Different Humans)



Autre grand espoir du post-punk, auteur d'un album autoproduit délivré uniquement en CD, Valuemart varie les plaisirs dans une vaste plaine allant de la darkwave au death rock. Pas du tout éloigné du registre de Rhume Carabiné. Sorti dans un certain anonymat, j'ai eu la chance de pouvoir croiser sa route et d'attraper aussitôt un disque. Seras-tu assez rapide ?



17 - Arse ‎– Primitive Species (Grupo, Erste Theke Tonträger)


Le mauvais garçon de la liste, le morveux qui fait rien comme il faudrait. Si Hank Wood était australien, il ferait partie de ces espèces primitives. Le disque est paru originellement en 2017, mais la sortie vinyle a attendu cette année... S'il te faut du sang frais, bois-le maintenant.



18 - Product KF ‎– Product KF (DIY)


Une production made in Chicago dont je ne sais foutre rien, à part que ça me plait. La lignée post-punk est pure, c'est sûrement des elfes ou un truc du genre. Le son de la démo respire l'authentique, le passionné resté perché en 1981. En quatre titres la messe est dite. En avant l'album maintenant.



19 - Aus – Aus (Static Age)



Excellente surprise que ce groupe allemand ! Cet album est d'abord paru sous la forme d'une cassette démo immédiatement éditée en vinyle par le label punk Static Age à Berlin. Heureuse initiative qui me permet de me souvenir de toute une pelletée de groupes à chanteuse comme Kebab (les belges) ou Kleenex (les suisses). Le disque est globalement réussi et "égal". Le genre à venir régulièrement se frotter au diamant.


20 - Selofan ‎– Vitrioli (Fabrika)


‎Première apparition dans P&C pour les grecs de Selofan, animateurs de la darkwave des balkans. Vitrioli, leur 6ème album, me parait leur disque le plus abouti, quoique inégal. Les tubes qu'il contient te feront danser jusqu'au bout de la nuit. En particulier ce Give Me A Reason digne des plus grands hits New Wave.


21 - Rendez Vous ‎– Superior State (Artefact)


Les avis sont partagés chez P&C sur les deux albums de Rendez-vous. Personnellement je préfère celui-ci. Je trouve qu'ils ont mûri dans la composition sans tomber dans le piège Iceage de la zik trop hermétique. Et je suis donc favorablement curieux de les voir défoncer le plancher d'un bar près de chez moi avec leur post-punk fringant. 




 22 - Wind Atlas ‎– An Edible Body (B.F.E, Hidden Track)


Ce nouveau disque de Wind Atlas propose un son plus électronique que le précédent, ce qui m'a un peu décontenancé. Je m'attendais à mon neofolk favori, ils me livrent une mixture moderne certes, mais moins facile à digérer. Les tubes du disque, Shedding Light en tête, suffisent à lui procurer une place dans cette liste. 



23 - Suir ‎– Soma (Manic Depression, Black Verb, DIY)



Le duo Suir fait plutôt dans la dentelle. Noire bien sûr.  J'ai vraiment bien accroché sur le face B du LP, qui me parait plus dense. Je trouve l'album très cinématique, il accompagnera idéalement tes virées nocturnes en voiture, à condition que tu ne sois pas trop pétochard. La peur du noir.



24 - Living Temples ‎– Against The Day (Manic Depression )


La note suédoise sur cette  liste. Il y en a souvent une... Le disque de Living Temples a un parfum death rock que Chris Connely ne renierait sans doute pas. Si tu as un tatouage des Sisters ou l'intégrale de King Dude, tu pourras te délecter des ambiances goth de Against The Day.



25 - Lycia ‎– In Flickers (Projekt)


Une quinzaine d'albums au compteur de Lycia, gardiens du temple 4AD contre vents et marées. Reformés en 2010 après un long hiatus, ils en sont à leur 4ème disque de cette nouvelle ère. C'est un album paisible plein d'une darkwave qui tire vers le neofolk et le romantisme. Il se pose, enchaîne ses titres, ses harmonies et tu te retrouves comme recouvert de neige.



26 - Travesty Child ‎– Lineage Of Hurt (DIY)



Un dernier pour la route. Pas de support physique pour cet EP, qui possède un joyau, Homage, en son cœur. Un morceau à la ligne de gratte absolument beautiful. J'attends de grandes choses de ce groupe à l'avenir. Un album avec plusieurs morceaux de cet acabit se retrouvera forcément dans mon prochain classement, qui arrivera sans doute encore plus vite que celui-ci. (Ph)

samedi 22 décembre 2018

Villes Nouvelles ‎– At The End Of Truth

Le premier album sous le nom Villes Nouvelles des anciens Chambre Froide est une franche réussite. Si des noms comme Martin Dupont ou Kas Product t'évoquent quelque chose, précipite-toi vers la boutique Detriti, le disque devrait être épuisé rapidement.



L'album sera très haut dans le top 2018 P&C, probablement dans les cinq favoris. Rempli ras-la-gueule de bonnes idées, inspiré, tendu, je le choisirai bien avant le Lebanon Hanover par exemple. Je te laisse juge.


Y'a vraiment des fois où il suffit de laisser la musique do the talking. Je peux écouter cet Escape en boucle. Finira sur une mixtape.


Tu pourras entendre le disque en entier sur leur bandcamp, histoire de vérifier que ces deux morceaux ne sont pas un coup de chance. 
Rendez-vous donc dans quelques semaines pour un retour sur l'année P&C et notre choix de disques. (Ph)

mercredi 5 décembre 2018

Rudimentary Peni ‎– Cacophony

Entre Death Church et Cacophony, mon cœur balance. C'est quand même plutôt le second que je joue le plus souvent. Instinctivement. J'ai pourtant mis du temps à percer la cuirasse de ce monument du death rock. Ayant découvert les deux albums simultanément au moment de leur sortie en CD en 1994, j'ai été renversé par l'abondance des morceaux et leur format très court, plus habituel dans le hardcore punk



Voilà donc l'affaire, un disque inspiré par la scène hardcore, dans son format, dans son ambiance, mais à la musique résolument post-punk, tendance death rock. Cacophony envoie donc trente titres qui durent entre trente-cinq secondes et trois minutes. L'univers Crass n'est jamais très loin, mais Blinko et sa bande respectent leur plan de marche original tout au long du disque.


Pas étonnant que les RP's aient inspirés nombre weirdos incluant pontes du grunge et de la noise. Je continue d'acheter leurs disques, qui ne déçoivent jamais. Ils sont un repère essentiel, recoupant avec talent plusieurs styles. J'aime aussi l'art visuel développé par Blinko, il fait partie de la recette et, lui aussi, a inspiré un grand nombre de dessinateurs en herbe. N'est-ce pas monsieur Naga ?



Deux titres sont loin de couvrir tout l'univers de Rudimentari Peni, mais c'est un bon début pour se remémorer à quel point ils étaient créatifs et donc intéressants. (Ph)